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QUE NOUS APPORTE LE JUDAÏSME DANS LA GESTION DES ÉMOTIONS, DE LA PEUR ET DES INQUIÉTUDES ?

Nous sommes tous confrontés quotidiennement à des situations anxiogènes diverses , sources de stress et de maladies. Nous finissons par être dépassés car nos mécanismes de défense s’épuisent. L’insomnie s’installe, la tristesse, la perte de l’estime de soi, le manque de confiance en soi, on ne gère plus le quotidien et on déprime.

Le premier réflexe est de consulter son médecin. Bonne décision pour trouver un espace d’écoute et des conseils pour gérer ses émotions. Les anxiolytiques peuvent aussi être indiqués, quelques jours, assortis d’un peu de repos en cas de burn-out. Cependant, il s’agit là d’une solution ponctuelle. L’essentiel étant d’apprendre à maîtriser au mieux ses émotions et ses inquiétudes afin de prévenir les états d’épuisement.

On ne peut échapper aux situations de stress. C’est la vie, on n’y peut rien. Mais, on peut changer sa manière de les réceptionner afin d’amortir les conséquences néfastes. Pour cela, il existe plusieurs formes de thérapies. L’une d’elle, la thérapie comportementale et cognitive (TCC) a montré son efficacité.
Les Sages de la Torah se sont aussi penchés sur la question.

Tout d’abord, ce très bon conseil, très connu, de Rabbi Na’hman de Breslev : « Et sache que l’homme doit traverser un pont très étroit, l’essentiel est de ne jamais avoir peur ! ». Rabbi Na’hman reconnaît que l’on ne peut échapper aux situations anxiogènes, puisqu’il concède que la vie est effectivement « un pont très étroit ». Cependant, l’essentiel pour ne pas trébucher, est, de ne pas avoir peur !

Ce conseil de Rabbi Na’hman nous paraît surprenant.
En effet, la peur n’est pas si négative que ça ! C’est une émotion naturelle ressentie chez chaque être humain, en présence d’un danger ou d’une menace. Elle est un instinct de conservation provoqué par l’analyse du danger et elle permet au sujet de le fuir ou le combattre.  Par conséquent, c’est un phénomène nécessaire, une self-défense, une manière de nous protéger. Pourquoi donc ce conseil de ne pas avoir peur ?

En réalité, la peur citée par Rabbi Na’hman ne concerne pas la peur réactionnelle, ponctuelle, naturelle et nécessaire à nous protéger. Elle vise celle qui finit par se chroniciser jusqu’à devenir pathologique, incontrôlable, irrationnelle et se transformer en une véritable terreur, voire phobies diverses envahissantes, à tel point que la vie devient un cauchemar.
D’où son merveilleux conseil : ne pas avoir peur, en l’occurrence, pas outre mesure,  pas au-delà de ce qui est indispensable pour nous préserver.

Autrement dit, apprendre à relativiser, à maîtriser nos émotions.
La régulation émotionnelle est certes un jargon des neurosciences, mais ces deux mots ont un grand impact sur notre vie quotidienne. Elle permet de surmonter les contrariétés au travail, les réflexions désagréables, le surmenage, le manque de temps, le manque d’argent, les conflits conjugaux, les sollicitations, les mauvaises nouvelles… La régulation émotionnelle nécessite un changement d’esprit, une autre façon de penser.

Il est prouvé scientifiquement que nous émettons une énergie électromagnétique qui a un pouvoir de guérison. (Lire De L’Esprit à la Matière, de Dawson Church). Lorsque devant la peur, nous produisons une énergie électromagnétique positive, cette dernière, par son activité thérapeutique, met un frein à nos émotions et nous apaise. Ainsi, notre esprit subjectif (nos pensées) influence notre monde objectif (notre vie).

La religion, notamment la ÉMOUNA, la foi en D.ieu, catalyse cette production d’énergie positive et nous aide ainsi à contrôler nos peurs.

Freud, en était persuadé. Mais, comme il était athée, il a considéré la religion plutôt comme une névrose obsessionnelle de masse, visant, à travers les rites, à protéger de l’angoisse. L’homme religieux répète les rituels collectifs pour éviter la confrontation avec le surmoi, l’autorité, la loi. Pour Freud, la religion, notamment le judaïsme dont il est issu, n’est qu’une illusion pour contrôler les peurs.

Pour le croyant, la foi en un D.ieu créateur est incontestable. Il ne s’agit pas d’une hypothèse, mais d’une vérité absolue. Ce n’est donc pas une illusion, ni de l’imagination. C’est d’ailleurs le premier article de foi rédigé par Maïmonide : «D.ieu existe et exerce Sa Providence.» Et Rabbi Na’hman d’enseigner : « Celui qui possède la foi, sa vie en est une, mais sans foi, il n’a plus du tout de vie. Car, il n’existe pas d’homme qui ne traverse pas d’ennuis…Lorsqu’il possède la foi, il peut se consoler…Mais, le sceptique qui n’a pas la foi, quand lui arrive quelque ennui, n’a personne vers qui se tourner et ignore par quel moyen se consoler. C’est pourquoi, il n’a plus du tout de vie. Mais, grâce à la foi en D.ieu, la vie de l’homme est bonne en permanence. » (Likouté Etsot).

La foi, la ÉMOUNA, nous aide donc à relativiser et par conséquent à maîtriser nos inquiétudes, nos peurs. Elle est une barrière contre les phobies et attaques de panique.

Na’houm Ich-Gamzou et Rabbi Akiva étaient deux hommes dont la foi en le Tout-Puissant n’avait pas de limites. Leur conviction était faite : tout ce qui pouvait leur arriver tendait nécessairement au bien. Comment le savaient-ils ? C’est très simple. Ils savaient que rien n’arrive par hasard ni à l’insu de D.ieu. Or D.ieu est bon ; donc rien de mal ne peut arriver.

La foi de ces deux hommes était la même, pourtant chacun l’exprimait différemment. Na’houm avait l’habitude de dire : « Gam zou letovah », ce qui en hébreu signifie : « Ceci aussi est pour le bien. » Et l’on croit que c’est parce qu’il répétait souvent cette phrase qu’il fut nommé « Gamzou ». De son côté, Rabbi Akiva avait coutume de dire « Kol mah deavid Ra’hamana, letav avid », ce qui en araméen (la langue la plus couramment parlée en ce temps-là par le peuple Juif, l’hébreu ne l’étant que par les érudits) signifie : « Tout ce que D.ieu Miséricordieux fait, Il le fait pour le bien. »

Il en est de même dans la vie. Le « mal » qu’on y rencontre est de deux sortes :
– Un inconvénient temporaire qui s’avère bientôt un bien déguisé.
– Un « mal » plus grave, comme la maladie ou même la mort, et qui, en apparence, ne comporte aucun bien.

Néanmoins, notre croyance profonde est qu’il est conçu dans une intention de bien, connue de D.ieu seul.
Cette croyance sans faille, qu’on appelle ÉMOUNA, est un bouclier contre le stress. Elle participe à la régulation émotionnelle. «D.ieu est Mon refuge, ma citadelle, en qui je place ma confiance ! Tu n’auras à craindre ni les terreurs de la nuit, ni les flèches qui voltigent le jour…Quand j’appelle D.ieu, Il me répond, Il est avec moi dans la détresse ! » s’écrie le roi David (TÉHILIM, 91). David, confronté à des moments très difficiles, a dû s’abriter sous les ailes protectrices de D.ieu pour garder son calme et continuer à vivre. Une manière pour lui de réguler ses émotions.

Je me permets ici une parenthèse purement personnelle :
Toute ma vie, encouragé par mes grands-parents et parents, j’ai mis ma confiance en HACHEM. Cela a débuté très jeune. Je priais pour avoir de bonnes notes à l’école, afin de ne pas décevoir mes parents qui souhaitaient tellement ma réussite. Étudiant, puis ensuite médecin et père de famille, j’ai connu, comme tout le monde des hauts et des bas. Afin de ne pas être dépassé par mes émotions, je me suis accroché à la spiritualité. Hachem, d’abord, Le Créateur de l’Univers, représentant pour moi, un Père spirituel. La Torah, ensuite, cette sagesse Divine, que je n’ai jamais abandonnée, la considérant comme une mère spirituelle. C’est ainsi que j’ai pu rompre avec mes inquiétudes, atténuer le stress et évoluer au mieux.

En résumé, réguler ses émotions, ses peurs, ses inquiétudes, est tout à fait possible. Cela s’apprend et le Judaïsme nous le confirme.
Il s’agit de penser autrement, de relativiser.
Tout dépend de la pensée.
Cette dernière est source d’énergie.
Les ondes électromagnétiques qu’elle émet, ont valeur thérapeutique.
Une énergie positive atténue les peurs et nous aide à atténuer le stress et ses conséquences néfastes.
L’esprit est capable de tout transformer.
Le Judaïsme nous apporte un outil précieux : la croyance en D.ieu, la ÉMOUNA.
Cette dernière provoque cette pensée positive et participe ainsi indirectement à la maîtrise des émotions.
Quand Rabbi Na’hman nous exhorte à ne pas avoir peur, c’est sa manière à lui de nous inciter à une foi en D.ieu, solide, inébranlable à toute épreuve.

 
Dr. Gilles UZZAN
Psychiatre – addictologue