Le confinement sous toutes ses coutures
« J’ai décidé de renforcer encore les mesures pour réduire nos déplacements et nos contacts au strict nécessaire ». C’est par ces mots, lundi 16 mars, que le Président de la République a décrété le confinement à l’ensemble du territoire national afin d’enrayer la pandémie de Covid-19. Et pourtant…
Dans son allocution de 21 minutes, Emmanuel Macron a pris soin de ne jamais employer le terme de « confinement », tâche qu’il délèguera à son ministre de l’Intérieur le lendemain. Tout sauf un hasard. Avant nous la Chine (22 janvier), l’Italie (10 mars), l’Espagne (14 mars)… Après nous le déluge : la Belgique (18 mars), l’Argentine (19 mars), l’Autriche (20 mars), la Grèce (23 mars), la Colombie (24 mars). A ce jour, un milliard de personnes sont confinées dans le monde.
Au-delà des gestes barrières, si simples et pourtant tellement essentiels, tous les spécialistes en santé publique s’accordent sur un point : confiner sa population est le premier moyen de freiner l’épidémie. Ainsi, et malgré l’impopularité d’une telle mesure, les chefs d’Etat de la planète ont du peu à peu s’y résoudre.
Il faut dire que la Chine, pionnière du Covid-19 à bien des égards, est parvenue par des dispositions drastiques de confinement de sa population à surmonter l’épidémie. Si dans un premier temps, elle a subi la vague de ce nouveau coronavirus de plein fouet, la mise en quarantaine d’un grand nombre de ses mégalopoles lui permet aujourd’hui, quatre mois après la découverte du premier cas, de n’annoncer que des cas d’importation du virus. Autrement dit, la contamination locale est enrayée et les seuls nouveaux cas le sont de voyageurs (r)entrant au pays.
Cette mesure fait l’unanimité, ou presque. Dans un récent sondage (YouGov), 93% des personnes interrogées jugent « nécessaires » les restrictions de déplacement, les fermetures de commerces et restaurants et même les sanctions en cas de sortie non justifiée. En outre, 83% des sondés se disent rassurés par le principe d’un confinement total et obligatoire. A cette adhésion citoyenne se conjugue celle de la Science. En effet, de nombreuses études scientifiques viennent corroborer la valeur ajoutée du confinement en période d’épidémie.
En outre, une étude internationale (T. Pueyo / CDCC) souligne l’importance de mettre en oeuvre le confinement le plus précocement possible, s’appuyant sur la théorie de « l’aplatissement de la courbe » : compte tenu du sous-diagnostic des cas réels, les mesures d’urgences étatiques sont primordiales.
Plus précoces elles sont, plus l’épidémie est contenue. Plus tardives elles sont, plus l’épidémie est hors de contrôle et croît de façon exponentielle. Plus les autorités tardent à réagir, plus il est difficile d’obtenir un aplatissement de la courbe. Il est impossible de rattraper les jours de retard dans le confinement, ce sont des jours perdus.
En dépit de son absolue nécessité, le confinement n’est pas sans risque pour notre santé mentale, cette fois. Tout le monde ne parvient pas à surmonter le confinement avec la même facilité et nous sommes, de par nos coutumes et notre histoire, un peuple qui n’est pas habitué au confinement, à l’inverse des Américains par exemple qui, plusieurs fois par an, se barricadent face aux ouragans.
Il faut donc prêter une attention spécifique aux besoins des groupes vulnérables, tels les plus jeunes et les personnes âgées. Il faut également atténuer au maximum les symptômes psychologiques : l’ennui, la peur, le stress. Il faut pour cela communiquer, encore et encore. Il faut expliquer et vulgariser pour permettre au plus grand nombre de comprendre et de ne pas demeurer dans l’incertitude.
C’est ce qui nous est étranger et inconnu qui nous fait peur. Ce virus est invisible et pourtant bien présent sur tout le territoire. Alors communiquons. En public, comme en privé. Nous pouvons rester proches et en contact sans pour autant se voir. Le monde d’aujourd’hui et tous les moyens de communications dont nous disposons le permettent. Profitons-en.
Dr Jonathan Taïeb
Médecin généraliste
Secrétaire Général de l’Association des Médecins Israélites de France