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Qui est Jacob Rodrigues Pereire ?

CES MÉDECINS JUIFS QUI ONT CHANGÉ L’HISTOIRE

Le précurseur de l’éducation des sourds et de l’orthophonie.

Tout le monde connait le boulevard Pereire à Paris qui rappelle le rôle joué par Émile (1800-1875) et Isaac (1806-1880), banquiers disciples de Saint-Simon, qui ont pris une part décisive au développement des grands travaux du Second Empire. Ils ont été à l’origine de la création de chantiers navals (comme les Chantiers et Ateliers de Saint-Nazaire), de compagnies maritimes, comme la célèbre Compagnie Générale Transatlantique. Mais on connait moins leur grand-père Jacob Rodrigues Pereire (1715-1780) considéré comme le pionnier de l’éducation des sourds-muets en France. Né à Berlanga, en Espagne, le 11 avril 1715, puis installé au Portugal, Jacob Pereire rejoint la communauté juive de Bordeaux en 1741 chassé par les persécutions de l’Inquisition. Il semblerait qu’il se soit intéressé à la surdité en raison de la présence dans sa famille d’une personne sourde et muette. À Bordeaux, Pereire s’est occupé d’une petite pension pour sourds-muets, cela lui a donné l’idée de mettre au point un alphabet spécial permettant de communiquer avec les sourds-muets qu’il a présentés d’abord devant l’Académie royale des Belles-Lettres de Caen, puis devant l’Académie royale des Sciences de Paris, en juin 1749. La méthode de Pereire s’articulait autour de deux axes essentiels : la prononciation et la stimulation de l’intelligence. Pereire avait modifié les méthodes utilisées auparavant afin de permettre aux sourds d’oraliser correctement. Au lieu des deux mains, Pereire n’en utilisait qu’une. L’idée novatrice de Pereire a été de créer des signes manuels exprimant la ponctuation, les majuscules, les minuscules, les liaisons. L’enseignement de Pereire était basé sur la compréhension plutôt que sur la simple répétition du français parlé et écrit comme le préconisait son principal concurrent l’abbé de l’Épée. Ce dernier soutenu par l’Église était un instructeur connu en son temps pour une méthode d’enseignement aux enfants sourds muets différente. Pereire insistait sur l’importance du toucher dans l’éducation des sourds afin que l’élève, en fonction de ses capacités auditives et phonatoires, préalablement testées, puisse distinguer les différentes sonorités émises. Il invitait également à la lecture labiale. Il encourageait ses élèves à se mêler au monde des entendants et il stimulait leur curiosité. Pereire obtient un grand succès qui lui a valu l’admiration de Diderot  qui parle de lui dans sa Lettre sur les sourds et muets (1751). Les qualités de Péeeire comme traducteur lui ont valu de devenir officiellement celui de Louis XV. Il a obtenu le titre de : « Interprète de Sa Majesté pour les langues espagnole et portugaise ». Son influence lui vaut de nombreux ennemis qui ont mis en avant le judaïsme de Pereire. L’Église nourrie de sentiments antisémites ne souhaitait pas que l’éducation des handicapés soit confiée à un Juif alors qu’elle était réservée aux prêtres. Pereire a déployé beaucoup d’énergie pour favoriser l’émancipation et la défense des intérêts de la communauté juive portugaise de Bordeaux dont il est nommé agent à Paris. Grâce à sa notoriété, il a obtenu entre autres, leur liberté de commercer et d’habiter dans toutes les régions du royaume, et fera abroger plusieurs coutumes vexatoires pour les juifs de Bayonne. Il a procédé à l’acquisition le 3 mars 1780, d’un terrain à la Villette pour servir de premier cimetière juif à Paris. L’abbé de l’Épée obtiendra de son côté une reconnaissance officielle pour ses travaux éclipsant Pereire . Il meurt le 15 septembre 1780. Petite anecdote le Beth Habad des étudiants se trouve dans la rue de l’Abbé de l’Épée car il n’y a pas de rue Jacob Rodrigues Pereire à Paris… et c’est dommage !