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Ces malades célèbres qui ont changé l’Histoire : la polyarthrite rhumatoïde de Raoul Dufy

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La corticothérapie a fait l’objet d’une médiatisation, aussitôt après sa découverte, en grande partie en raison de son utilisation par Raoul Dufy (1877-1953), qui présentait une polyarthrite rhumatoïde dont les premiers symptômes sont apparus en 1937 alors qu’il réalisait l’œuvre artistique majeure de sa carrière : La Fée Électricité.

Raoul Dufy avait bénéficié de traitements symptomatiques qui n’avaient pas amélioré sa polyarthrite, qui s’était aggravée au cours des années qui ont suivi. L’invalidité de Dufy est devenue si importante qu’il ne pouvait se déplacer sans béquilles.

Le 12 décembre 1949, un bref article de Life Magazine, illustré par une photographie qui révélait les mains déformées du peintre, avait attiré l’attention du Dr. F. Homburger, qui lui a proposé de venir à Boston, tous frais payés, afin de bénéficier d’un traitement par la cortisone et l’ACTH, qui constituait un traitement expérimental du laboratoire Merck. Dufy a accepté aussitôt l’offre qui lui a été faite, et le 20 avril 1950, il a débarqué du paquebot De Grasse aux États-Unis. Il est alors hospitalisé au Jewish Memorial Hospital de Boston, où il est pris en charge par une équipe médicale qui avait déjà l’expérience de la corticothérapie chez des malades chroniques.

Dufy était le premier malade atteint de polyarthrite rhumatoïde sur lequel ils ont essayé un traitement par corticoïdes. L’équipe du Dr. Homburger a débuté un traitement par des injections de corticoïdes qui ont eu un effet miraculeux.

Quasiment grabataire, Dufy retrouva en quelques semaines la plupart de ses performances physiques antérieures, et bon nombre d’activités de la vie quotidienne redevinrent possibles. Il ne s’était jamais senti aussi bien depuis des années. Le coup de fouet dû à la cortisone lui a permis de pouvoir utiliser à nouveau son pinceau avec agilité et facilité.

Il a écrit à ses médecins bostoniens :

« Je peins en ce moment des sujets que j’étudiais quand j’étais jeune et qui ne me satisfaisaient plus. Dans les œuvres construites à la manière de Cézanne, j’ai ajouté des couleurs pures et imaginaires que j’ai cherchées en vain pendant plus de trente ans. »

Il était également conscient des limites du traitement en ajoutant quelques lignes plus loin :

« Est-ce une renaissance ou un chant du cygne ? ».

Dufy a présenté des effets secondaires de ce traitement, qui lui ont occasionné des brûlures épigastriques, des diarrhées, l’aggravation d’une ostéoporose préexistante et des abcès fessiers, secondaires aux multiples injections intramusculaires.

Dufy a regagné la France où il a poursuivi son traitement par corticoïdes jusqu’à son décès brutal, le 23 mars 1953 à l’âge de 78 ans, consécutif à une hémorragie digestive, favorisée par la prise d’aspirine et masquée par la corticothérapie.

Dr. Bruno HALIOUA

Pour en savoir plus : L’Histoire de la médecine pour les Nuls (Bruno Halioua, Editions First)